Lionel Demarty est cofondateur en 2011 d’un bureau de contrôle Air Bat Contrôle et d’un bureau d’études BETB (Bureau d’Études Techniques du Bâtiment). Ces entreprises interviennent dans l’Ariège (09), sur la Haute-Garonne (31) et dans les Pyrénées-Orientales (66) dans le domaine des performances thermiques et énergétiques.
Entrepreneur dans le secteur du contrôle du bâtiment depuis 1996, il nous apporte un éclairage particulier sur la RT 2012. Monsieur Demarty défend cette réglementation de construction car elle nous permet des économies significatives d’énergie mais déplore le manque de compétences des bureaux d’études, qui ne sont actuellement soumis à aucun contrôle de la part de l’État.
CoFaber : Quelle est la nature de vos prestations ?
Lionel Demarty : On a deux structures en fait, un bureau de contrôle Air Bât Contrôle qui est agréé par le Ministère du Logement pour lequel vous m’avez contacté, et un bureau d'études BETB (Bureau d’Études Techniques en Bâtiment). Nous réalisons des études thermiques réglementaires et études structurales, particulièrement pour des bâtiments à ossature en bois.
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C : Quel a été votre parcours ?
LD : L’entreprise Air Bat Contrôle, je l’ai créée en 2011. J’avais avant cela un bureau de contrôle indépendant que j’avais créé en 1996. J’ai eu un parcours classique : INSA de Lyon en 4 ans après une prépa à Toulouse pour obtenir un diplôme d’ingénieur en génie civil et urbanisme en 1989. J’ai ensuite été conducteur de travaux pour une grosse société en région parisienne qui faisait de la construction d’immeubles autour d’Orly (94), de 1990 à 1996, année à laquelle j’ai décidé de m’installer à mon compte.
C : Vous avez créé votre entreprise assez tôt dans votre parcours professionnel. Pourquoi ce goût pour l'entrepreneuriat ?
LD : Parce que j’avais envie de faire quelque chose de différent du métier de conducteur de travaux. C’est un métier très bien quand tout se passe bien sur le chantier mais dès qu’il y a des problèmes, par exemple des retards, c’est tout de suite le conducteur de travaux qu’on charge.
Je n’ai pas cette mentalité de salarié, j’ai donc décidé de m’installer à mon compte en créant un premier bureau de contrôle. J’ai lancé ça avec une associée qui est ingénieure également et l’aventure a bien fonctionné, même si cela avait été dur au début.
De fil en aiguille, j’en suis arrivé à Air Bat Contrôle et BETB il y a maintenant 8 ans. A mon âge, je vais en rester là.
Rénovation thermique d'une maison traditionnelle en Ariège (09)
C : Entre 1996 et 2019, cela fait 23 ans d’évolutions en termes de normes et de performances énergétiques. Quelles ont été pour vous les changements les plus marquants ?
LD : Le bureau de contrôle qu’on avait en 1996, c’était un bureau de contrôle structurel, on était sur des normes générales du bâtiment, quelque chose de très classique. On est vraiment arrivé sur des normes spécifiques avec la RT 2012.
On a vendu notre ancien bureau de contrôle avant de créer Air Bat Contrôle sur un autre secteur géographique, car on voulait se mettre au vert. Air Bât Contrôle, c’est essentiellement pour la RT 2012 et pour les normes thermiques qui vont d’ailleurs encore évoluer dans un an. Pour résumer, les évolutions que j’ai connues, c’est tout simplement l’entrée dans la RT 2012.
C : Pouvez-vous détailler les changements apportés par cette réglementation ?
LD : Je ne suis pas spécialement pour l’accumulation des lois, on en a beaucoup en France. La RT 2012, en revanche, je vais la défendre. D’abord, ce n’est pas une loi française mais une loi européenne. Le problème, c’est qu’en Allemagne elle fait 323 pages et en France elle en fait 1421, vous voyez déjà un peu le remaniement.
Cette fois malgré tout, la base de cette loi est bien faite. Elle traite entre autres d’un problème important, celui de la perméabilité à l’air. Cette notion de perméabilité à l’air a permis de comprendre que des bâtiments, bien que bien isolés thermiquement, étaient encore déperditifs parce qu’il y avait toujours des entrées d’air parasites.
On sait aujourd’hui qu’un bâtiment qui est à la fois très étanche à l’air et bien isolé est très peu énergivore. A titre d’exemple, on a fait récemment une étude sur 2 ans d’activité sur un bâtiment qui respecte la RT 2012 et on arrive à des dépenses énergétiques qui sont quasiment divisées par 3, ce qui est énorme ! Il y a la perméabilité à l’air qui joue, mais aussi les exigences en termes d’isolation, de chauffage, d’eau chaude sanitaire et de ventilation. Pour un logement de 100 m2 pour 5 personnes, on est à 850 € de dépenses annuelles en consommation globale, c’est très peu. Il y a 20 ans, il nous fallait 2 000 € à 2 500 €.
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Tout cela fait que la RT 2012 a du bon, mais elle a aussi du mauvais. Il y a un point que je vais vous exposer et qui va sans doute vous intéresser. Dans ce domaine, il y a d’une part les bureaux de contrôle à qui on demande des diplômes et des qualifications et d’autre part les bureaux d’études qui sont des prescripteurs et à qui on ne demande rien. Cela signifie qu’aujourd’hui n’importe qui peut faire l’acquisition d’un logiciel de traitement, faire une formation d’une semaine et lancer sa société en faisant de la prescription.
Avec une centaine de bureaux de contrôle, je m’oppose à cela et je réclame auprès du Ministère du Logement et de l’Égalité des Territoires que les prescripteurs soient des personnes qui viennent du bâtiment et qu’elles aient une formation et une certification comme nous, bureaux de contrôles. En Allemagne, au Danemark ou en Suisse, tout le monde reste à sa place et cela fonctionne mieux qu’en France.
Nous avons aujourd’hui en France des bureaux d’études qui ne connaissent pas le bâtiment et ses données techniques comme les coefficients d’isolation des matériaux, les performances des systèmes de chauffage, … résultat : ils recommandent juste ce qu’il y a de plus cher. Cela fait qu’on arrive à la polémique qu’on a actuellement sur le surcoût lié à la RT 2012 dans la construction, prétendument entre 15% et 25%. A cause de cela, les gens ont peur de construire et cela me met en colère ! En réalité, avec un vrai bureau d’étude compétent, le surcoût est inférieur à 5%. C’est donc un gâchis énorme, notamment pour des bâtiments publics ! C’est pour cela que j’ai créé le BETB en parallèle de Air Bat Contrôle, parce que j’étais effaré des préconisations que je recevais de certains bureaux d’étude pour des bâtiments que je devais contrôler.
Intervention de Air Bat Contrôle pour la construction d'un village vacances
C : Vous travaillez autant pour le résidentiel que le public et le tertiaire ?
LD : Oui, c’est à peu près cela. Je me suis particulièrement spécialisé dans les crèches et les maisons de retraite car il y a une approche spécifique que je trouve intéressante au niveau conception.
C : Vous intervenez sur quelle zone ?
LD : Nous sommes situés à Tarascon-sur-Ariège (09) et nous avons un bureau sur Toulouse, ce qui nous permet d’intervenir sur le Grand Toulouse ; nous intervenons également du côté de la Cerdagne (66) sur des chantiers avec des bâtiments en ossature bois, ce qui est très intéressant.
C : C’est en pleine montagne, dans les Pyrénées. Quelles sont les différences par rapport à un milieu non montagneux ?
LD : Il n’y a pas tellement de différence notable, si ce n’est qu’on passe de 10 cm à 14 cm de laine de verre dans les murs périmétriques et de 30 cm à 40 cm dans les combles. Les systèmes et modes constructifs autrement restent les mêmes. On reste sur un niveau de 50 kWh/m2/an en dépense maximale.
C : Quels sont les corps de métier avec qui vous travaillez ?
LD : J’ai affaire à beaucoup d’entreprises et je fais en sorte que certains corps de métier soient là aux réunions de préparation : les architectes, les métiers de l’isolation, sans oublier les plombiers et les électriciens qui sont très concernés du fait des réseaux qui traversent les murs. Il y a aussi les menuiseries périmétriques, c’est-à-dire posées sur les murs extérieurs, qui rentrent beaucoup en jeu.
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